Autrefois jugé has-been, le jardinage est devenu tendance.
La moitié des Français cultivent leurs fruits et légumes avec passion et gourmandise. Mais jardiner, cela s’apprend !
Au JDBN, nous avons rencontré Philippe Collignon, LE spécialiste du jardinage en France.
Chroniqueur dans l’émission Télématin sur France 2, journaliste, auteur, animateur et conférencier, Philippe Collignon vient de publier plusieurs ouvrages dont « Un potager pour les Nuls », « Je Jardine zéro Déchet ».
Des carnets de bord complets pour les jardiniers en herbe, qui donnent une envie irrésistible de gratouiller la terre.
Interview
Votre passion pour la botanique a puisé ses racines dans le terreau familial. Racontez-nous l’évolution de votre vocation…
Philippe Collignon :
Je suis issu d’une famille d’ouvriers. Mon grand-père avait un jardin d’ouvrier et tous les dimanches, notre sortie, c’était le jardin de famille ! À l’âge de 6 ans, j’avais la grande mission de pomper l’eau pour remplir les arrosoirs du jardin.
Puis un peu plus tard, j’ai dévoré les magazines de vente par correspondance sur le jardinage. C’était ma passion.
J’ai d’ailleurs appris tous les noms latins des plantes. C’est pour vous dire à quel point j’étais enthousiaste !
Cette passion chevillée au corps, j’ai naturellement étudié la botanique et la biologie végétale.
Je suis ensuite devenu enseignant de ces spécialités, à Lyon.
J’ai alors eu l’opportunité de travailler en tant qu’expert du jardinage pour Télé Lyon Métropole. Puis j’ai continué sur ma lancée, dans l’émission « Coucou, c’est nous » de Dechavanne, mais aussi sur France 2 et France 3.
Je suis toujours chroniqueur, notamment dans l’émission Télé Matin sur France 2. J’ai dernièrement participé à une émission sur le thème de la sécheresse, sur France 5.
J’ai sans cesse avancé avec cette même colonne vertébrale : l’amour pour le jardin et le potager.
J’ai trouvé le sens de ma vie dès mon enfance. Une chance !
Je ne suis jamais sorti de cette thématique qui me fait vibrer chaque jour. Et je me cultive moi-même au quotidien.
J’apprends toujours grâce à des rencontres avec des spécialistes passionnés.
La nature m’a énormément appris sur la vie.
Depuis 35 ans, vous avez à cœur de transmettre votre passion et votre savoir en matière de jardinage. Nous vivons à l’heure actuelle un engouement pour le jardinage, le potager …Quel regard portez-vous sur ce retour à la nature ?
Philippe Collignon :
Il y a encore une dizaine d’années, le jardin était taxé de ringard. C’était un peu une activité réservée aux retraités…
Et puis effectivement, un peu avant la période COVID (au moment où les prix des fruits et des légumes ont commencé à augmenter), on a assisté à un retour de flamme pour le jardin et le potager.
Ceci s’est doublement accentué avec la crise sanitaire et l’inflation actuelle.
De nos jours, le jardin est devenu tendance. Les habitants de grandes villes ont été nombreux à prendre la poudre d’escampette après les différents confinements et à s’acheter une maison avec jardin.
Tout le monde s’est mis à planter des tomates, des salades, des haricots…L’envie d’un retour à la terre a germé.
Depuis, le jardinage est devenu un art de vivre, une récréation vitale pour nous, les Homos Sapiens du troisième millénaire.
Durant ce temps passé dans son potager, on débranche, on se déconnecte. On revient à la terre. Aux plaisirs simples de voir pousser ses plantations, de s’extasier devant la beauté de la nature.
C’est un retour à l’équilibre, d’une certaine manière.
Depuis trois ans, on enregistre une hausse de 20% des potagers en France. Et pour rester sur des chiffres qui parlent d’eux-mêmes, 48% des Français ont leur propre potager.
Donc pour résumer, le potager est dans le vent.
Il permet d’économiser de l’argent et de produire des fruits et des légumes de qualité.
Il offre également quelque chose qui n’a pas de prix : prendre du temps pour soi, les pieds ancrés sur la terre nourricière.
Nul besoin d’avoir une surface importante pour créer son potager.
Tout est possible si on a les bons réflexes et quelques connaissances pour bénéficier des trésors de Mère Nature, en bonne intelligence.
Vous avez publié le livre « Un potager pour les nuls », extrêmement complet et accessible au plus grand nombre. Quelles sont les bases pour se lancer dans la création d’un potager, avec succès ?
Philippe Collignon :
Pour commencer, il faut avoir une réelle envie de donner vie à un potager et de l’entretenir. Il s’agit donc d’avoir une certaine constance dans son projet.
Ensuite, je dirais qu’il faut avoir une bonne exposition, c’est-à-dire 6 heures de soleil par jour.
Le mieux est de ne pas avoir de vent. Mais si tel n’est pas le cas, on peut avoir recours à des haies pour contrer le vent. Petite astuce : si on a un mur plein, on peut installer le potager contre ce mur, qui a l’avantage d’absorber la chaleur et de la retransmettre le soir.
Enfin, il faut disposer d’un sol apte au potager. Évidemment, il est compliqué de savoir par avance si un terrain est propice à la culture, si on n’a pas de connaissance sur le sujet.
Voici une petite astuce pour savoir si votre sol n’est pas trop argileux : prenez de la terre à 10-15 centimètres du sol, faites-en une boule et mettez-la dans un bocal.
Si au bout de 4/5 minutes, la boule se délite, alors le sol est bon pour la culture. Si en revanche cette boule de terre reste compacte au bout d’une heure, alors ce n’est pas bon signe. Le sol est trop argileux.
Mais si ce cas se présente, pas de panique ! : il existe des solutions pour alléger le sol. En ajoutant du sable, du terreau, il est possible de donner vie à un potager même avec une terre peu engageante au départ.
Autre petite chose à savoir. Comme disait mon grand-père, « si tu vois des orties sur un terrain, alors l’endroit est idéal pour planter un potager ! »
L’ortie est intelligente. Elle se dresse là où la terre est la meilleure : elle est légère, drainante, pourvue en matières minérales. Donc, ouvrez l’œil !
Nous vivons une période de sécheresse, qui risque de se répéter de plus en plus souvent à l’avenir. Quels conseils pourriez-vous nous apporter afin d’adapter les potagers à cette nouvelle donne climatique ?
Philippe Collignon :
Je milite depuis longtemps pour le « jardin du paresseux » : cela veut dire avoir le moins d’impact négatif sur la biodiversité et sur les plantations en général.
Cela se traduit par une nouvelle discipline comme moins tondre son gazon (on peut y ajouter des fleurs pour avoir un jardin fleuri).
Tondre et arroser son gazon trop souvent, c’est devenu une hérésie !
Certains font des forages dans leur jardin, c’est encore autorisé mais il va falloir lever le pied sur l’eau…
Les chiffres donnent le vertige : en un an, pour 100 m2, on dépense 20.000 litres d’eau. En France, la surface de tous les jardins représente 2% de la surface de notre territoire. Je vous laisse faire le calcul…
Il existe heureusement des solutions pour pallier le manque d’eau, qui va s’accroitre au fil des années.
Par exemple, en couvrant le sol avec du paillage, vous conservez un taux d’humidité du sol acceptable.
On sera forcé de freiner sur les espèces végétales dites « exotiques », qui demandent de nombreux soins contre les maladies et de beaucoup d’eau.
Autre astuce : en période de sécheresse, mieux vaut se concentrer sur des plantes en pleine terre que sur des plantes en pots.
Certaines plantes comme les graminées, le dipladénia sont peu gourmandes en eau tandis que des plantes comme les géraniums qui ornent nos balcons, ont souvent soif.
Pour le potager, bien entendu le manque d’eau va être criant.
Misez sur des cultures de légumes perpétuels qui reviennent chaque année sans avoir à être replantés. Je pense aux poireaux, aux choux, au rutabaga peu exigeants en eau.
L’homme a toujours été inventif et face à la nouvelle donne climatique, il doit repenser la culture au sens large.
Les consommations effrénées d’eau n’ont plus de sens.
Chacun doit remplir sa mission de citoyen responsable.
Nous sommes à la croisée des chemins, en raison des conséquences rapides du changement climatique. Quelles mesures devrions-nous tous prendre, dès maintenant ?
Philippe Collignon :
En premier lieu, sur le plan collectif, il va falloir repenser la forêt de demain.
Nos forêts sont plantées avec une seule espèce par parcelle : on voit dans une forêt des épicéas, dans une autre des marronniers…
Or, l’urgence consiste à planter des forêts multi-espèces.
Cette mixité offre une meilleure solidité face aux vents, une résistance à la sécheresse et enfin, elle permet de réduire le risque d’incendies. Quand vous avez des forêts uniquement composées de pins, tout brûle très rapidement.
Cela ne serait pas le cas si les parcelles accueillaient différentes espèces d’arbres.
Sur le plan individuel, il faut d’ores et déjà envisager de réduire sa consommation d’eau.
En choisissant des plantes résistantes à la sécheresse, des graminées, des légumes perpétuels, en replantant des arbres au cœur de son jardin (qui apportent ombrage et fraîcheur), on anticipe le manque d’eau qui est déjà une réalité.
Les agriculteurs vont devoir replanter des haies bocagères (qu’ils avaient arrachées avec le remembrement), afin de conserver le maximum d’eau. Rappelons que les racines maintiennent la terre sur la roche-mère. Les haies pourront aussi faire « barrage » en cas de tempêtes et d’inondations.
De même, les particuliers vont devoir réfléchir à planter des haies, qui ont le mérite de « casser » le vent. N’oublions pas que dans 30 ou 40 ans, nous aurons des épisodes fréquents de tempêtes, de tornades.
Préparons-nous dès maintenant ! L’eau va véritablement devenir « l’or bleu ».
Le jardin est devenu le nouveau coin de paradis des Français. Il est un havre de liberté…
Propos recueillis par Anne Bouquet, en exclusivité pour le JDBN.
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ANNE BOUQUET
Journaliste depuis une vingtaine d’années en presse écrite, j’ai mené une vie professionnelle classique : salariée d’un quotidien régional, d’une revue économique, de différents hebdomadaires locaux…
Une vie passionnante où j’ai eu la chance de rencontrer beaucoup de monde.
Curieuse de nature, passionnée par la vie, j’ai mis par la suite mes passions au premier plan : ésotérisme, parapsychologie, techniques de bien-être, culture, littérature…
Aujourd’hui, je travaille en tant que journaliste free- lance, pour des sites internet et des agences de communication.
Et puis j’écris des livres pour de belles âmes…
L’écriture est une énergie. À nous de la faire voyager, librement.
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Anne Bouquet.
source: JDBN – crédits photos: Avec aimable autorisation de PHILIPPE COLLIGNON – photo couverture: Image par Bianca de Pixabay – Montage JDBN