Thé vert, soja, antioxydants, jeûne… Autant d’aliments, de substances ou de pratiques alimentaires auxquelles sont prêtées des vertus anti-cancer. Si certaines de ces affirmations sont infondées, d’autres sont étayées par les résultats de nombreuses études, et validées par des expertises collectives nationales et internationales. Malheureusement, faire la part du vrai et du faux n’est pas toujours simple.
Depuis deux décennies, le réseau NACRe (réseau National Alimentation Cancer Recherche) fait avancer les connaissances sur les liens entre nutrition et cancer. Il met aussi à disposition du public les derniers résultats de la recherche dans ce domaine.
Fruits et légumes, fibres alimentaires, produits laitiers : à l’occasion de son vingtième anniversaire, voici une présentation des principaux facteurs nutritionnels reconnus comme réduisant le risque de cancers.
Les fruits et légumes
La consommation de fruits et légumes est associée à une diminution du risque de cancers aérodigestifs (cancers de la bouche, du pharynx, larynx, nasopharynx, œsophage, poumon, estomac, et côlon-rectum), avec un niveau de preuve jugé probable.
Rappelons qu’il existe trois niveaux de preuve (par ordre décroissant) : convaincant, probable, suggéré/limité. Ils dépendent du nombre, de la qualité, de la cohérence des études disponibles, ainsi que de l’existence de mécanismes sous-jacents permettant d’expliquer les effets constatés.
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Peu caloriques, les fruits et légumes contiennent notamment des fibres et des micronutriments (vitamines, minéraux) ainsi que de nombreux microconstituants (polyphénols, caroténoïdes, molécules soufrées…). Ces derniers peuvent influencer la cancérogénèse à travers de nombreux mécanismes biologiques, tels que des activités antioxydantes ou antiprolifératives ou des modulations du métabolisme des molécules étrangères à l’organisme.
Il est recommandé de consommer au moins cinq portions de 80-100 g par jour de fruits et légumes, sous toutes les formes possibles : frais, surgelés, en conserve, crus ou cuits. En revanche, il vaut mieux limiter sa consommation de jus de fruits à un verre par jour au maximum. Ils contiennent des quantités élevées de sucre, et moins de fibres que les fruits.
Soulignons également que les féculents tels que la pomme de terre sont exclus de cette catégorie « fruits et légumes »…
Les fibres alimentaires
La consommation de fibres alimentaires est associée à une diminution du risque de cancer colorectal, avec un niveau de preuve jugé probable.
Cet effet protecteur s’explique par des effets biologiques variés : réduction des taux d’insuline dans le sang, de la résistance à l’insuline, des concentrations d’hormones stéroïdiennes circulantes, du temps de transit intestinal et de l’exposition des cellules du côlon aux substances cancérogènes présentes dans la lumière du gros intestin (l’espace intérieur de l’organe, circonscrit par ses parois).
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Il est recommandé de manger des aliments riches en fibres tels que des légumes secs comme les lentilles ou les haricots secs au moins deux fois par semaine. La consommation quotidienne d’un produit céréalier complet tel que le pain complet est aussi conseillé.
Les cinq portions de fruits et légumes quotidiennes citées précédemment apportent elles aussi leur lot de fibres alimentaires.
Les produits laitiers
La consommation de produits laitiers est associée à une diminution du risque de cancer colorectal (niveau de preuve jugé probable).
Leur effet protecteur proviendrait du calcium qu’ils contiennent, ainsi que des bactéries lactiques qu’ils apportent. Il est de ce fait actuellement recommandé de consommer deux produits laitiers par jour tels que lait, yaourts non sucrés, ou fromages.
Soulignons qu’une consommation importante de produits laitiers est associée à une augmentation du risque du cancer de la prostate, cependant le niveau de preuve est limité.
En complément de ces facteurs alimentaires, les recherches ont également démontré que la pratique d’une activité physique, même modérée, permet aussi de limiter le risque de survenue de cancer.
L’activité physique, un important facteur de protection
Faire de l’exercice est associé à une diminution du risque de cancer du côlon (niveau de preuve convaincant), ainsi qu’à une diminution du risque de cancers du sein après la ménopause et de l’endomètre (niveau de preuve probable).
Ces résultats sont valables pour tous les types d’activité physique et tous les niveaux d’intensité. En revanche, la réduction du risque du cancer du sein avant la ménopause n’est établie que pour une activité physique d’intensité élevée.
Plusieurs mécanismes peuvent expliquer l’importance de l’activité physique dans la lutte contre les cancers. L’exercice entraîne une diminution des concentrations sanguines d’hormones et facteurs de croissance, et influe sur la résistance à l’insuline et l’inflammation. Il stimule aussi l’immunité et accélère le transit intestinal, limitant ainsi l’exposition de l’intestin aux substances cancérogènes en voie d’élimination par les selles.
Il est recommandé de pratiquer au moins l’équivalent de 30 minutes par jour d’activité physique dynamique ,c’est-à-dire d’intensité au moins équivalente à celle de la marche rapide. Il est également conseillé de réduire la sédentarité : ne pas rester assis trop longtemps, et prendre le temps de marcher un peu toutes les deux heures.
Fruits et légumes et activité physique contribuent également à diminuer les risques de surpoids et d’obésité, facteur impliqué dans la survenue de plusieurs cancers.
Éviter les facteurs de risque
Les conclusions des travaux d’expertises collectives sont claires : agir efficacement en prévention des cancers, c’est avant tout éviter de s’exposer aux facteurs de risque. Ceux-ci sont aujourd’hui bien connus : il s’agit principalement du tabac, de l’alcool, d’une alimentation déséquilibrée et du surpoids.
Selon le Centre international de Recherche sur le Cancer, 346 000 nouveaux cas de cancer ont été diagnostiqués en 2015 en France chez les adultes de 30 ans et plus. Parmi eux, 142 000 cas seraient attribuables aux modes de vie et à l’environnement, soit 41 % de tous les nouveaux cas de cancer.
On considère qu’en France, 16 % des nouveaux cas de cancer chez les hommes et 20 % chez les femmes sont attribuables à des facteurs nutritionnels. En effet, si le tabac arrive en tête des quatre principales causes de cancer évitables (20 % des cancers attribuables), les trois autres concernent l’alimentation. Il s’agit de l’alcool (8 %), de l’alimentation déséquilibrée (5,4 %) et enfin du surpoids et de l’obésité (5,4 %).
Inrae / DR
L’insuffisance d’activité physique serait quant à elle responsable de 0,9 % des nouveaux cas de cancers. Enfin, une durée d’allaitement maternel insuffisante serait en cause dans 0,5 % des nouveaux cas de cancers du sein.
Pour limiter le risque de cancers, les premières des priorités sont donc de diminuer la consommation des boissons alcoolisées, de veiller à avoir une alimentation équilibrée et diversifiée, ainsi que de maintenir un poids de forme et de pratiquer une activité physique régulière.
Pour aller plus loin :
Betty Subrizi
– Le compte Twitter et la chaîne YouTube du réseau NACRe. – Le site Internet du réseau, où sont consultables de nombreuses informations, sous forme de dépliants et de vidéos :
la collection « Manger, boire, bouger… Comment réduire son risque de cancer ? » ;
la collection « Décrypter & Comprendre » ;
la collection « Jeûne et cancer »
Paule Latino-Martel, Directrice de recherche. Coordinatrice du Réseau National Alimentation Cancer Recherche (réseau NACRe) de janvier 2000 à septembre 2020, Inrae et Bernard Srour, Coordonnateur du Réseau National Alimentation Cancer Recherche (réseau NACRe) – Scientist at the Divison of Cancer Epidemiology, German Cancer Research Center DKFZ, Heidelberg, Inserm
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original. crédit photo couv: pixabay