Yuma (États-Unis) (AFP) – Le photovoltaïque, en plein boom aux Etats-Unis, doit permettre de remplacer petit à petit des sources d’énergie polluante. Mais les panneaux solaires hors d’usage sont souvent simplement jetés, avec une filière du recyclage encore à ses balbutiements.
Sous un hangar de Yuma, une petite ville de l’Arizona (sud-ouest), des ouvriers contrôlent les machines qui broient ces grandes plaques vitrées.
« Nous voyons la première génération de panneaux solaires être recyclés », se félicite Adam Saghei, patron de We Recycle Solar, une entreprise qui cherche depuis des années à leur donner une seconde vie.
« Et ce qui est génial, c’est que nous sommes à la pointe » de cette industrie naissante, dit-il à l’AFP, derrière ses machines à Yuma, près de la frontière avec le Mexique.
L’énergie solaire « est une énergie renouvelable et il faut trouver une solution pour la retraite de ces matériaux », insiste-t-il dans son gilet de sécurité orange fluo.
Car après une durée de vie d’une trentaine d’année, les panneaux solaires finissent, par défaut, dans les déchetteries, sans être recyclés, ce qui entraine la perte, au passage, de minéraux contenus dans les cellules photovoltaïques.
C’est justement pour récupérer ces éléments précieux, dont de l’argent et du cuivre, que les ingénieurs de We Recycle Solar travaillent depuis trois ans.
Derrière cette recherche se cache un enjeu essentiel pour le secteur solaire: montrer que son secteur, qui veut remplacer celle des énergies fossiles polluantes, n’engendre pas lui-même des dommages à l’environnement.
La question est d’autant plus importante que les Etats-Unis investissent massivement dans le solaire pour produire de l’électricité de façon plus propre.
« Tsunami de panneaux solaires »
« Il va y avoir très bientôt un tsunami de panneaux solaires qui vont revenir » après leur utilisation, prédit Adam Saghei. Devant son hangar, des piles de ces grandes plaques inutilisables s’entassent.
Une première partie de ces panneaux, les moins abîmés, sont rénovés afin d’être revendus à moindre prix sur d’autres marchés.
Ceux qui ne peuvent pas être réparés deviennent alors des « mines » desquelles sont extraits les matériaux pour les revendre.
C’est le cas de l’argent et du cuivre. Les ouvriers de We Recycle Solar dépose ces grands panneaux dans des broyeurs, en tirant notamment de fins filaments d’argent.
Sur le site de Yuma, l’entreprise dit pouvoir recycler jusqu’à 7.500 panneaux solaires par jour. Et, au total, leur technologie permet de recycler « jusqu’à 99% » des matériaux, en fonction du type de panneaux », se félicite Adam Saghei.
Mais ce processus coûte cher. Non seulement la revente des produits récupérés ne permet pas de financer le recyclage, mais la collecte des panneaux éparpillés, ici sur des toits de maisons individuelles, là dans de grandes installations en plaine, est complexe.
Et les Etats-Unis font porter ces coûts à l’utilisateur final, ce qui pousse ce dernier à passer à la déchetterie plutôt que dans une filière de recyclage.
« Soutien des pouvoirs publics »
« Il faut un soutien des pouvoirs publics » pour financer cette étape du recyclage, estime Meng Tao, spécialiste des énergies renouvelables à l’Université d’Etat de l’Arizona.
Pour lui, le développement d’un cycle de vie efficace pour les panneaux solaires est une question urgente.
Les Etats-Unis s’étant engagés à limiter les combustibles fossiles lors de la récente COP28, l’installation de panneaux solaires devrait atteindre son apogée d’ici deux décennies.
Lorsque le secteur arrivera à « maturité », le rythme des installations de panneaux et leur démantèlement une fois usés « sera à peu près le même », observe Meng Tao.
« Il n’y a pas grand monde qui se lance dans ce secteur, parce que recycler, ça coûte cher », confirme de son côté le chef d’entreprise Adam Saghei. « Ca demande beaucoup de main d’oeuvre, beaucoup d’énergie ».
Pour lui, la solution est de revendre à la filière solaire les matériaux récupérés pour les réutiliser dans la fabrication des nouveaux panneaux.
Et, espère-t-il, « quand le secteur va passer à des volumes plus grands, nous serons capables de réintroduire ces matériaux dans la chaîne d’approvisionnement ».
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