Om mai padme hūm (en sanskrit ॐ मणि पद्मे हूँ / oṃ maṇi padme hūṃ, parfois suivi d’une septième syllabe, हृः / hṛḥ), ayant pour diminutif मणि / maṇi, est un des plus célèbres mantra du bouddhisme. C’est le mantra des six syllabes du boddhisatva de la compassion Avalokiteśvara (Guanyin en chinois, Kannon en japonais, Chenrezig en tibétain). Il est donc également nommé mantra de la grande compassion (mahākarunā).

 

Son rayonnement est universel dans le bouddhisme mahāyāna mais il est également un mantra national du Tibet.

 

Pratique et signification

Sa récitation se fait en concurrence avec une visualisation très détaillée du mandala d’Avalokiteshvara, c’est-à-dire de l’assemblée des déités qui l’accompagne. Chacun des éléments de cette représentation, ornement, objet rituel, est lui-même symbolique. Ainsi chacun de ses quatre bras représente un des quatre incommensurables.

 

De syntaxe imprécise, le sens du mantra comporte de nombreuses dimensions, mais signifie grosso modo hommage au joyau du lotus et plus précisément « le joyau dans le lotus », ces deux termes étant eux-mêmes de profonds symboles, que le méditant tient à l’esprit. Un joyau est évidemment précieux ; ici on réfère au joyau-qui-accomplit-tous-les-souhaits (sank. citānmani, tib. yishin norbu), une sorte de pierre philosophale orientale dont le symbolisme est transmuté au niveau spirituel: il s’agit de notre sagesse innée, la nature-de-bouddha ou tathagatagarbha, mais aussi du guru qui nous en transmet la reconnaissance. Parmi les gemmes, le diamant ou vajra occupe une place spéciale dans le vajrayāna. Par exemple le vajradhātu est la sphère du diamant, inaltérable, claire et brillante, à l’instar de la réalité ultime. Son mandala est extrêmement élaboré et inclut les déités que les syllabes du mantra représentent.

 

Quant au lotus il surgit de la boue pour fleurir au soleil sans être lui-même entaché, symbolisant par là la pureté et la beauté. Encore ici la nature essentielle ne subit pas les distorsions adventices du samsāra, tout comme l’être qui a assimilé les sagesses de la vacuité et de la non-dualité. Les citations ci-dessous donnent encore d’autres dimensions de ces symboles.

 

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De plus, chacune de ses syllabes est le bīja, l’essence-semence de libération de chacun des domaines ou règnes d’existence, des paradis des devas jusqu’aux enfers. C’est donc envers l’univers entier que le pratiquant envoie sa compassion. On peut aussi faire du mantra l’invocation du muni (sage) ou bouddha de chacun de ces domaines. Et encore, chacune des syllabes représente une des six vertus transcendantes, ou pāramitās de la pensée du mahāyāna, que le pratiquant cherche à actualiser en lui-même. Voici le tableau de ces correspondances.

 

Syllabe (Bija) Vertu (Pāramitā) Sagesse (Jñāna)10 Distorsion type (Klesha) Domaine samsarique Couleur11
Om Générosité (Dāna) De l’Égalité Orgueil Dieux (Devas) Blanc
Ma Éthique (Shīla) Tout-accomplissante Envie Titans (Asuras) Vert
Ni Tolérance (Kshānti) Passion Humains Jaune
Pad Persévérance (Vīrya) Tout-embrassante Torpeur Animaux Bleu ciel
Concentration (Dhyāna) Discriminante Avidité Fantômes (Preta) Rouge
Hum Discernement (Prajñā) Semblable-au-miroir Haine Enfers Bleu nuit ou noir

Selon Donald Lopez de l’Université de Chicago, auteur et spécialiste du vajrayāna, Manipadmé serait un vocatif interpellant Manipadmā, donc un autre nom d’Avalokiteshvara, sous forme féminine. Il pourrait cependant s’agir d’une personnification tardive du Joyau-Lotus.

 

Il dénonce aussi une autre interprétation racoleuse: En effet dans le langage codé, dit « crépusculaire », du tantrisme, le lotus réfère au vagin, alors que le mani ou le vajra désigne le pénis. Ces connotations ne sont pas évoquées ici, et ne justifient pas une traduction telle que « Hommage au joyau dans le lotus »: « en se basant sur les sources tibétaines et sur une analyse de la grammaire, il apparaît que le mantra ne peut pas signifier le joyau dans le lotus et que les infinies variations de cette mésinterprétation sont seulement fantaisistes13. »

 

Quant à Alexander Studholme, de l’université de Cambridge, il soutient dans un récent livre sur ce mantra14, que dans le contexte du Kāraṇḍavyūha-sūtra, Manipadmé serait un locatif signifiant « dans le Joyau-Lotus », et désignant le mode de naissance dans la « Terre Pure » du Bouddha Amitabha, où le récitant aspire à renaître. Il confirme aussi que ce serait un nom d’Avalokiteśvara ou de sa parèdre, et que ce mantra condense plusieurs niveaux d’intention spirituelle.

 

 
Om mani padme hum

Victor Adolphe Malte-Brun écrit au XIXe siècle : « Dans la religion du Bhoutan, comme dans celle du Tibet, il existe une formule sacrée dont les mots hom-ma-ni-pê-mé-houm sont de nature à ne pouvoir être traduits d’une manière satisfaisante à cause de leur sens abstrait et mystique. .. Toute la doctrine lamaïste se résume dans cette formule : hom adoucit les tribulations du peuple ; ma apaise les angoisses des lamas ; ni soulage les chagrins et les afflictions des hommes ; pe diminue les douleurs des animaux ; houm enfin tempère les souffrances et les peines des damnés. Cette célèbre formule est répétée par tous les religieux ; elle est écrite en tous lieux, sur les bannières, sur les temples, sur les casques des chefs, sur les murailles des habitations et sur les montagnes : quelques-unes de celles-ci la présentent formée avec de grosses pierres fixées dans le sol, de manière qu’on peut la lire d’une très grande distance. »

 

source: http://fr.wikipedia.org – crédit photo: Jeff Golenski

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