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La structure physique d’un aliment a davantage d’impact sur le poids que sa composition. Elle agit sur la satiété, l’index glycémique, l’absorption des nutriments. Les aliments ultra-transformés dont la matrice est déstructurée font davantage grossir.

C’est devenu un réflexe pour tous ceux qui se préoccupent de leur ligne… Avant d’acheter un plat préparé ou une crème dessert au chocolat par exemple, ils chaussent leurs lunettes pour décrypter les informations nutritionnelles indiquées sur les emballages. Une manière de regarder ces produits par le petit bout de la lorgnette ! «Un aliment est bien plus qu’une somme de glucides, lipides, protéines, vitamines, minéraux, à fortiori de calories, martèle Anthony Fardet, chercheur en nutrition, auteur de Halte aux aliments transsformés, mangeons vrai! (Ed. Thierry Souccar). Ces nutriments sont organisés au sein d’une structure physique, appelée matrice ».Et celle-ci aurait davantage d’impact sur la prise de poids que sa composition !  Différents paramètres physiques définissent la structure d’un aliment : sa porosité, sa dureté, sa capacité à retenir l’eau, sa texture liquide, visqueuse ou solide… autant de spécificités souvent visibles à l’oeil nu. Mais la matrice se caractérise aussi par la nature des molécules qui la composent, leur arrangement dans l’espace, ou encore par les interactions entre ses principaux constituants.  Un exemple : les pâtes cuites. Elles se distinguent par leur épaisseur et leur forme, mais aussi par le degré de la gélatinisation de l’amidon lorsqu’il l’absorbe l’eau. Elles se différencient  enfin par les interactions qui existent entre l’amidon et le réseau de protéines qui les constituent. La combinaison de toutes ces particularités a un impact considérable sur la manière dont notre corps « profite » de ce qu’on mange. Démonstration.

 

La matrice conditionne la satiété

Petit rappel en guise de préambule : la capacité des aliment à nous rassasier est un paramètre déterminant dans les problèmes de surpoids d’obésité. « Des aliments peu satiétogènes incitent à grignoter entre les repas et souvent des produits gras et sucrés riches en énergie », poursuit Anthony Fardet. A composition identique en nutriments et donc en calories, deux aliments avec des structures physiques différentes n’auront pas le même impact sur la satiété. Un exemple : on est davantage et plus longtemps repu après avoir mangé une pomme qu’une compote fabriquée avec la même variété de ce fruit et à fortiori son jus. De même, des carottes bouillies sont plus satiétogènes qu’un mélange reconstitué des mêmes nutriments, les fibres et la structure du légume en moins. Un aliment solide est plus satiétogène qu’un aliment visqueux ou semi-solide ou encore liquide, plusieurs études l’ont démontré. « La nécessité de mastiquer les aliments durs augmente le temps qu’ils passent dans la cavité buccale mais aussi au contact des muqueuses digestives, souligne Anthony Fardet. Cette stimulation sensorielle favorise la sécrétion des hormones de satiété ». Son équipe a étudié le potentiel satiétogène de 380 aliments prêts à consommer. « Nous avons montré que plus un aliment est transformé, plus sa matrice est déstructurée, moins il rassasie, détaille le chercheur. Ainsi un épis de maïs nature rassasie plus que du maïs doux en boite et davantage encore que des Corn flakes. Le même style de comparaison peut s’appliquer entre des légumes vapeur, un  potage maison et une soupe déshydratée.

 

La matrice impacte la digestion

La matrice a un impact considérable sur la manière dont l’aliment va être digéré. Elle module le volume de protéines, glucides, lipides, vitamines, minéraux et oligoéléments qui vont être absorbés par la muqueuse digestive. Pour une raison simple : sa structure limite plus ou moins l’accès des enzymes digestives à ces différents nutriments. Les amandes par exemple sont riches en graisses et donc très caloriques. Mais ces graisses sont piégées dans les cellules fibres fibreuses de ce fruit sec que l’on avale souvent sans trop le mâcher. Elles sont donc partiellement absorbées par l’intestin. Elles le sont beaucoup plus lorsque l’amande est transformée en poudre. Un autre exemple avec les pâtes. Celles qui sont fabriquées avec une farine complète sont constituées de particules plus grosses. Ce qui réduit l’accès de l’enzyme qui digère l’amidon, l’alpha-amylase, à son substrat. Le degré de gélatinisation de l’amidon opère aussi. Moins elles sont cuites, moins l’amidon est accessible. L’épaisseur des pâtes intervient également. Moins elles sont poreuses (à retirer) Plus elles sont épaisses, «Les fibres alimentaires jouent un grand rôle dans cet effet “matrice”, analyse le chercheur. Puisqu’elles procurent de la structure aux aliments comme dans les produits végétaux et limitent l’accès des nutriments aux enzymes digestives ».

 

La matrice module l’index glycémique

La manière dont les glucides sont digérés conditionne l’index glycémique des aliments. Ce paramètre reflète la capacité à élever la glycémie qui est le taux de sucre dans le sang. L’augmentation de la glycémie entraîne la sécrétion d’insuline par le pancréas. Plus un aliment fait grimper la glycémie, plus le corps doit fabriquer d’insuline pour la faire baisser et plus son index glycémique est élevé… Et moins il rassasie : « Tous les glucides provoquent un pic de glycémie 30 minutes après leur ingestion, précise Anthony Fardet. Seulement l’amplitude de ce pic est plus ou moins grande et dépend de la structure physique de l’aliment. » Cet effet matrice a été démontré pour plusieurs aliments. Des pains de composition identique, mais avec des mies de densité différentes, n’ont pas le même index glycémique. Plus la mie est compacte, plus les sucres sont lentement absorbables et moins le pic de glycémie est élevé. La forme et l’épaisseur des pâtes ont aussi un impact sur leur index glycémique. Celui des pâtes linguine d’épaisseur 3,9 mm est inférieur a celui des linguine 1,6 mm, par exemple. D’autres paramètres modulent l’arrivée du glucose dans le sang, comme le niveau de gélatinisation de l’amidon. Ainsi un riz très cuit, collant a un index glycémique plus élevé qu’un riz ferme.

 

Il faudrait toujours se méfier des aliments mous

Nuggets de poisson, chips, steak haché congelé, bonbons, crèmes dessert… La structure des aliments ultra-transformés n’a plus rien à voir celles des ingrédients bruts dont ils sont issus : le poisson, la viande, les légumes, les fruits, le lait, les céréales. Ils sont fabriqués en combinant de multiples composés obtenus par le fractionnement de ces matières premières, le cracking. Du blé donne de la farine blanche, du son, du gluten, de l’amidon de blé, de l’amidon modifié de blé, du sirop de glucose, du dextrose…  Autant d’ingrédients que l’on retrouve associés dans le pain de mie, par exemple. Pour leur donner une tenue, une forme, les industriels y ajoutent une flopée d’additifs : épaississants, liants, etc. Ces aliments riches en énergie sont souvent mous, digérés plus rapidement que les aliments naturels bruts, ils sont peu satiétogènes et présentent un index glycémique élevé, prévient Anthony Fardet. Ils favorisent donc l’obésité, le diabète de type 2 et des maladies chroniques plus graves qui en découlent comme certains cancers et les pathologies cardiovasculaires ».  Par ailleurs, ils ont souvent perdu au cours de leur fabrication les nutriments bénéfiques présents dans leur matière première : fibres, vitamines, minéraux, polyphénols… Le raffinage/fractionnement des céréales en particulier, entraîne une perte de 80 % des vitamines et minéraux et de la majeure partie des fibres alimentaires. Ce sont des calories vides !

Source – crédit photo: pixabay